Soudan : près de 74 millions $ de la Banque africaine de développement pour booster la production de blé
Daf'Allah Mohamed Ahmed est l’un des 1 400 agriculteurs et bénéficiaires du programme Technologies pour la transformation de l’agriculture africaine (TAAT) au Soudan
Abidjan, le 13 décembre 2022 – Le Conseil d’administration du Groupe de la Banque africaine de développement a donné son feu vert, le 9 décembre 2022, à Abidjan, à l’octroi de 73,81 millions pour financer le Projet de production d'urgence de blé au Soudan, conçu dans le cadre de la Facilité africaine de production alimentaire d'urgence.
L’agriculture est l’épine dorsale de l'économie soudanaise : représentant 60 % des exportations, le secteur génère un tiers du PIB et emploie plus de la moitié des travailleurs.
Le Soudan, troisème plus grand pays d’Afrique, souffre depuis longtemps d’une extrême insécurité alimentaire due à de multiples facteurs, entre déclin économique et hyperinflation, déplacements de population induits par le conflit et mauvaises récoltes agricoles. Une situation aggravée par une hausse spectaculaire des prix des produits alimentaires et de l’énergie dans le pays : sur la plupart des marchés, les prix du sorgho et du millet ont bondi de 150 à 200 % depuis 2021 ; le prix du blé a flambé davantage encore, quasi-triplé par rapport à 2021. Car 60 à 70 % du blé consommé au Soudan est importé, en grande partie de Russie et d'Ukraine. Les engrais également ont vu leurs prix tripler, de même que l'énergie, alimentant ainsi l'inflation.
Ce financement du Fonds africain de développement va permettre de fournir, à grande échelle, des semences de qualité́ certifiée de variétés adaptées au climat et des engrais, et en offrant des services de vulgarisation et les bonnes pratiques agronomiques, le projet devrait permettre de faire passer la production de blé́ de 630 000 tonnes aujourd’hui à 1,52 million de tonnes dans deux ans (+241 %). Quelque 400 000 ménages de petits exploitants agricoles, dont 40 % de femmes, bénéficieront du projet. Et près de 800 000 travailleurs occasionnels, hommes et femmes, profiteront des retombées en termes d’emplois créés le long des chaînes de valeur du blé́, des semences et des engrais.
« Le Soudan, doté de la plus grande zone irriguée d'Afrique subsaharienne, a un énorme potentiel pour, non seulement parvenir à l'autosuffisance en blé, mais aussi se muer en exportateur », souligne Nnenna Nwabufo, directrice générale de la Banque africaine de développement pour l’Afrique de l’Est.
Pour ce faire, le projet cible les petits exploitants agricoles et les travailleurs saisonniers, mais aussi les producteurs de semences et les négociants agricoles dans les principales régions de culture du blé au Soudan, comme Al-Jazira, New Halfa, Nord, Nil et Nil Blanc, aux larges périmètres irrigués, donc davantage résistants aux changements climatiques.
Le Programme alimentaire mondial (PAM) au Soudan est chargé de mettre en œuvre le projet.
« Le Projet de production de blé d’urgence au Soudan (SEWPP) profitera des retombées et des enseignements tirés de projets antérieurs que la Banque a financés dans le pays », précise Mary Monyau, responsable pays de la Banque africaine de développement au Soudan. Ainsi du projet « Technologies for African Agricultural Transformation (TAAT) Wheat » qui, entre 2018 et 2021, a changé la donne dans le secteur du blé́ soudanais : les rendements moyens sont ainsi passés de 1,5 à 2,3 tonnes/hectare et la production de moins de 350 000 tonnes à 1,1 million de tonnes en cinq ans seulement (de 2014 à 2019).
La Facilité africaine de production alimentaire d’urgence a été lancée en mai 2022, à l’initiative du Groupe de la Banque africaine de développement. Dotée de 1,5 milliard de dollars, elle a pour objectif d’aider les pays africains à éviter une crise alimentaire imminente, due à la perturbation des approvisionnements alimentaires résultant de la guerre en Ukraine.
La Banque compte actuellement 19 opérations au Soudan, pour un engagement total de 486,2 millions de dollars. Le secteur de l'agriculture est le plus large bénéficiaire, avec 272,3 millions de dollars d’investissements (56 % du portefeuille).
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